Pascal de Izaguirre, directeur général de Corsairfly depuis juin, prend les rênes d’une entreprise accusant 29 millions d’euros de pertes pour 500 millions de chiffre d’affaires sur l’exercice 2008-2009. Il va cesser les activités de charter de la filiale de l’allemand TUI pour en faire une compagnie régulière. Objectif: séduire une clientèle business.
Corsairfly a des difficultés financières graves. Comment comptez-vous redresser la compagnie?
– Nous avons engagé un programme de transformation, Take off 2012, qui vise à redéfinir la compagnie. De charter, elle va devenir une compagnie régulière. Le but est de devenir rentable dans trois ans, selon la feuille de route qui m’a été fixée par mon actionnaire.
Quels sont les principaux axes de Take off 2012?
– Nous allons améliorer le produit et la qualité de service au client, redéfinir le programme de vol, changer la politique commerciale. Et nous allons chercher un nouveau type de clientèle en plus de celle que nous avons déjà et qui nous est fidèle.
Quels clients voulez-vous conquérir?
– Nous sommes principalement une compagnie loisirs, mais nous aimerions avoir plus de clientèle business. Nous avons une classe affaires, Grand Large, que nous projetons de rénover complètement, avec un nombre de sièges et un confort bien plus importants.
Les prix vont-ils augmenter?
– Non. Parce que nous souhaitons offrir le meilleur rapport qualité-prix du marché. Nous voulons être très compétitifs.
Quelles destinations allez-vous garder?
– Nous allons nous concentrer sur nos destinations historiques: les Antilles et La Réunion. Nous opérerons des vols quotidiens vers Pointe-à-Pitre, Fort-de-France, La Réunion. Nous gardons Miami, le Canada, Madagascar, Saint-Martin et Mayotte. Nous arrêtons les destinations charter, comme le Kenya et la République dominicaine, et toutes les escales intermédiaires en province. Nous nous recentrons sur Paris.
Pensez-vous acheter de nouveaux avions?
– Nous n’en avons ni acheté ni vendu. L’objectif, en 2012, est d’acheter des A 330-300. Tous les avions que nous garderons par ailleurs seront entièrement reconfigurés et rénovés, avec de nouvelles cabines.
Allez-vous conserver vos très gros-porteurs B 747, surdimensionnés?
– Nous en avons six aujourd’hui, nous allons passer à trois. Ils sont trop gros pour s’adapter à la saisonnalité du trafic.
Air France a le projet de lancer sa filiale low cost. Qu’en pensez-vous?
– Je ne me prononcerai pas sur Air France. Mais même les plus grandes compagnies ont besoin de faire évoluer leur modèle économique, tant la réussite des low cost est incontestable.
Une grande compagnie aérienne peut-elle encore faire du court et du moyen-courrier aujourd’hui, ou est-ce que face aux low cost la partie est perdue?
– Je crois effectivement qu’il est très difficile à une compagnie régulière de s’adapter. Le fait même de créer une filiale low cost est très compliqué. Le long-courrier est protégé des compagnies à bas coûts parce que le taux d’utilisation des flottes est partout très élevé: un A 330, chez nous, vole 5.500 heures par an, c’est compliqué de faire plus, en termes de productivité.
Les compagnies low cost font tout payer: repas, placement… Jusqu’où peut-on aller?
– Corsairfly rend un service complet. Nous ne nous interdisons pas de penser à des options, par exemple pour augmenter la qualité du plateau-repas, mais le système a des limites, parce que le prix affiché devient juste un attrape-nigaud.
Et que pensez-vous de la dernière sortie de Michael O’Leary, le P-DG de Ryanair, qui veut supprimer les copilotes?
– Ce n’est pas sérieux. O’Leary est fidèle à sa ligne provocatrice, qui est un moyen de faire parler de sa compagnie. Quand on est patron d’une compagnie aérienne, la sécurité est une priorité absolue. Chez nous, la question ne se pose absolument pas.
Source: challenges.fr / Propos recueillis par Anna Rousseau et Jean-Baptiste Diebold.