Lundi 1er juin, je viens à peine d’atterrir à Paris, après quelques jours de vacances passés au Brésil, quand j’apprends la « disparition » du vol Air France AF-447 Río de Janeiro–Paris. Un vol parallèle au mien, avec un trajet et des horaires similaires, et qui devait rejoindre la capitale française une heure et demi après moi. A l’hôtel, une petite cellule de crise se forme, où je reçois les informations en temps réel des deux côtés de l’Atlantique, par les médias brésiliens, la télévision française et le téléphone.
Quelques heures après avoir allumé la télévision, j’ai eu l’impression que quelque chose changeait dans la manière dont les informations étaient relayées. J’ai remarqué que le nom de la compagnie aérienne à laquelle appartenait le vol, Air France, après être apparu dans tous les titres, commençait lui aussi à disparaître, remplacé par celui d’Airbus. Les médias brésiliens continuaient quant à eux de citer le nom d’Air France dans tous leurs flashs sur l’accident.
Aujourd’hui, le 4 juin, les Unes des journaux français et brésiliens conservent cette particularité. Lorsqu’on regarde les articles consacrés au crash aérien dans les versions en ligne des trois journaux français les plus lus, on ne trouve le nom d’Air France que quatre fois, et jamais dans le titre (une fois dans Le Monde, une fois dans Libération et deux fois dans Ouest France). Le Figaro fait toutefois exception en citant douze fois la compagnie française dans son article. Dans les journaux brésiliens, c’est une autre histoire. Dans O Globo, Air France est cité huit fois, sans compter le titre. La Folha de São Paulo le mentionne à six reprises, le Jornal de Brasil, quatre. Quant à El Correio do Povo, il ne le cite que deux fois, mais Air France apparaît dans le titre.
Des différences « étonnantes »
Autre différence « étonnante », le contraste entre les informations diffusées de part et d’autre de l’Atlantique. Au Brésil, on identifie immédiatement une vaste zone, proche de l’île Fernando de Noronha, du côté brésilien, où l’avion serait tombé. Pendant ce temps, en France, on cherche l’avion vers les côtes africaines, sans même faire part des thèses brésiliennes, qui semblent se confirmer par la suite. Concernant les causes de l’accident, les conditions météorologiques et la foudre sont très vite évoquées côté français, avant même de savoir avec certitude si l’avion s’était crashé, ou à quel endroit. Cette théorie attribue la responsabilité de l’accident à des causes extérieures et exclut de possibles défaillances techniques ou humaines, imputables à la compagnie aérienne ou au constructeur de l’appareil.
Tout ceci pourrait relever du hasard, de simples différences de style journalistique ou d’une mauvaise coordination de l’information. Cependant, compte tenu des intérêts en jeu, le hasard me paraît peu probable et la mise en place d’une stratégie de communication, évidente.
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