Merci aux USA pour une vérité qu’on voulait nous dissimuler
Vous savez tout ou presque sur ce crash du vol 9535 de Gemanwings qui s’est planté le mardi 24 mars à 10h47 pas loin de Barcelonette. Vous ne devez pas cette information au Directeur du BEA, Rémi Jouty, qui déclarait mercredi 25 en fin d’après-midi, lors d’une conférence de presse au Bourget, que son équipe avait réussi à écouter le fichier audio de la « boîte noire », en l’occurrence le CVR (Cockpit Voice Recorder), qui enregistre tous les sons au cockpit, les communications entre les pilotes ainsi que celles du contrôle aérien.
Il a ajouté que « l’avion s’était engagé dans une descente au pilote automatique », ce qui n’était pas un scoop pour tous les pilotes de ligne, qui pouvaient déjà déduire ce fait de l’étude de la trajectoire radar. Il affirmait également « qu’il était beaucoup trop tôt pour tirer la moindre conclusion sur ce qui s’est passé », alors qu’il disposait du contenu du CVR et connaissait parfaitement les raisons essentielles de ce crash.
Il est vraisemblable que le Gouvernement, qui a autorité sur le BEA, a du s’effrayer d’apprendre qu’il s’agissait d’un crash suicidaire a pensé aussitôt aux conséquences qui pourraient en résulter sur les élections de Dimanche 29, s’il s’avérait que ce drame avait une origine de terrorisme islamique. Il était donc jugé bon de décaler au moins à la semaine suivante les raisons de ce crash.
La vérité, vous la devez à « l’indiscrétion d’une personne liée à l’enquête dans le milieu militaire », qui s’est confiée au New York Times le mercredi 25. Ce journal a publié à 23h05 (heure de Paris) l’information capitale « que l’un des pilotes a quitté le cockpit et n’a pu y retourner avant la chute de l’avion ». Vous remarquerez le laconisme et l’imprécision de cette information, parfaitement voulu, alors que la réalité leur était connue ! En fait, on peut se demander si l’indiscrétion n’a pas pour origine une écoute des « grandes oreilles » de la NSA (National Security Agency). Devant le silence du BEA-Gouvernement, sachant que c’était un crash suicidaire qui pouvait être provoqué par un objectif terroriste, les USA ont estimé nécessaire de diffuser cette information, pour que le monde aéronautique mondial prenne des éventuelles précautions que le Gouvernement Français s’apprêtait à masquer pour une durée indéterminée.
Au passage, je souligne le jacobinisme bien franchouillard, qui fait que le BEA est à la botte du Gouvernement, sur le plan budgétaire, organisation et fonctionnement. Quel contraste avec le NTSB américain, (National Transport Safety Board), qui est rigoureusement indépendant et qui en a apporté la preuve, notamment dans une féroce bagarre avec Boeing pendant dix ans, jusqu’à ce que le constructeur national finisse par admettre ses fautes dans la conception de la queue du B 737, qui avait provoquée plusieurs crashs. Le NTSB ne rend compte qu’au Congrès américain. Imaginez-vous une chose semblable en France entre Airbus et le BEA ? Moi pas !
Le déroulement du vol
Le graphique ci-dessous donne en rouge la vitesse et en bleu l’altitude. Ces données proviennent de l’enregistrement de la trajectoire radar. Le contrôle aérien a sur le scope radar une étiquette qui donne la référence du vol, l’altitude et la vitesse air de l’avion, laquelle est en altitude plus faible que la vitesse sol. On voit que tout se passe normalement jusqu’à cette mise en descente fatale.
Le timing est le suivant, tel que donné par le Procureur de Marseille, à partir des données du CVR (cockpit Voice Recorder) et assorti de mes remarques.
Entre 10 heures et 10 h 20 : Pendant les vingt premières minutes de vol, « il ne se passe rien d’anormal », a rapporté Brice Robin, le procureur de Marseille lors d’une conférence de presse, jeudi 26 mars.
D’après les enregistrements de la cabine issus du CVR, le comportement et les échanges entre le pilote et le copilote sont normaux depuis le début du vol. Leur discussion est “fluide, décontractée, voire enjouée” a précisé le procureur.
10 h 27 : L’avion atteint une altitude de croisière de 38 000 pieds, au large de Toulon.
Avant 10 h 31 : Le commandant entame le briefing, c’est-à-dire le passage en revue de la fin du trajet du vol et des différentes procédures à suivre en vue de l’atterrissage à l’aéroport de Düsseldorf. Selon le procureur, les réponses du copilote se font « brèves, laconiques, alors qu’on pourrait s’attendre à un échange, à un dialogue ». On peut voir dans ce changement de ton la confirmation d’une décision préméditée de planter l’avion.
10 h 30 : Pour la dernière fois, l’A320 entre en contact avec le contrôle aérien au sol. L’un des deux pilotes indique « Direct IRMAR merci 18G ».
Il montre ainsi qu’il a pris bonne note de l’ordre que vient de lui donner le contrôleur aérien de se diriger directement vers le point de passage « IRMAR » et le remercie en rappelant l’indicatif radio de l’appareil : il s’agit d’une communication normale.
10 h 31 : Le commandant de bord quitte ensuite la cabine, vraisemblablement pour satisfaire un besoin naturel. « Je te laisse les manettes » dit-il à son copilote. On entend un siège reculer, la porte se fermer.
10 h 31 : Le copilote est seul dans le cockpit. Ayant selon toute vraisemblance prémédité le crash de l’avion, il affiche une altitude inconnue pour l’instant tant qu’on n’aura pas dépouillé l’enregistreur de paramètres et appuie sur un bouton pour commander une mise en descente. Il reste en pilote automatique. La poussée passe sur réduit et l’avion se met dans un piqué identique à ce qu’il ferait pour aller se poser à Düsseldorf, c’est à dire environ 3.300 pieds/minute. Le cap reste pratiquement constant, sur la route prévue.
Entre le départ du commandant de bord et le crash : Le CDB, de retour des toilettes, demande à plusieurs reprises l’ouverture de la porte du cockpit selon la procédure habituelle, en tapant un code et en se signalant par visiophone. Sans succès. Il tape ensuite sur la porte de la cabine, de plus en plus fortement. Le copilote ne répond pas, « volontairement », selon le procureur.
Le contrôle au sol, puis la tour de contrôle de Marseille tentent à de multiples reprises de contacter l’avion par radio. La tour demande également de passer le transpondeur de l’avion en mode alerte, ce qui lui aurait permis d’être prioritaire sur les autres aéronefs en cas d’atterrissage d’urgence, puis aux avions alentours de servir de relais radio. Le copilote ne réagit pas.
10 h 35 : Conformément aux procédures et en constatant la descente et le silence radio de l’appareil, la Direction du contrôle aérien lance l’alerte, « DETRESFA » qui s’accompagne du décollage d’avions de chasse pour tenter de rejoindre l’Airbus A320. Vainement, car il sera crashé avant l’interception.
Dans les secondes qui précèdent le crash : Les coups sur la porte blindée du cockpit se font de plus en plus violents, pour « défoncer la porte » selon le procureur.
Les alarmes du GPWS (Ground Proximity Warning System) avertissant de l’approche du sol se font entendre, ainsi que des cris de passagers. Jusqu’à cet instant « la respiration du copilote, qui reste silencieux, est normale ».
10 h 40 m 47 s : L’Airbus A320 est pour la dernière fois détecté par un radar français, à une altitude quasi identique à celle où a été retrouvée l’épave.
Il percute la montagne à une vitesse de 378 nœuds (700km/h) à une altitude de 1.850 mètres et l’avion se désintègre complètement.
Au sujet de la porte du cockpit
Après le 11 septembre 2001, les USA ont imposé au reste du monde aéronautique que les parois et portes d’accès aux cockpits soient blindées et que la porte soit fermée et bloquée en permanence. Bien entendu, dame nature est là et jusqu’ici, aucun avion de ligne ne comprend des toilettes à l’intérieur du cockpit, ce qui implique bien entendu des sorties des pilotes.
Il est probable que le crash Germanwings va donner lieu à une réflexion sur l’installation de toilettes-cockpit, car d’autres crashs du même genre se sont déjà produits.
La porte est munie d’un verrou électrique commandé par un bouton sur le pylône entre les pilotes, ainsi que d’un code d’accès, qui permet aux pilotes ou chefs de cabine d’accéder. Mais il y a aussi une possibilité de blocage de ce code par les pilotes pour des raisons de sureté et dans ce cas la porte restera obstinément fermée, ce qui s’est passé dans le cas du GW 9535.
Je précise que depuis les crashs du 11 septembre 2001, il n’y a plus de hache en cabine et qu’il était parfaitement illusoire de vouloir forcer la porte, même avec celle-ci.
Faut-il imposer une présence au cockpit, pour éviter le cas du pilote seul ?
Comme d’habitude dans le cas d’un drame, on n’a pas enterré les victimes que l’on songe aussitôt à sortir des lois de circonstance. Question : les pilotes de TGV sont seuls dans leur cockpit et roulent à 300 km/h avec 1.000 passagers. Faut-il leur imposer une deuxième personne, pour le cas où ils voudraient se suicider ?
Si un pilote veut se suicider avec tout l’avion qui l’accompagne, il peut le faire à chaque vol, même si le deuxième pilote est à son poste. Citons par exemple le vol Egyptair en 1999 où le CDB a planté volontairement son Boeing 767 et 217 passagers dans l’Atlantique. Il y a aussi celui d’Air Maroc de 1994 où le CDB a planté son ATR 42 avec ses 44 passagers dans l’Atlas, et d’autres cas semblables existent Il suffit de pousser sur le manche à proximité du sol et c’est quasiment imparable.
Pour traiter un cas d’espèce, n’allons pas créer d’autres problèmes qui viendraient inéluctablement se greffer.
L’aspect psychique du copilote Andreas Lubitz
Agé de 28 ans, il avait deux résidences officielles : la maison familiale à Montabaur (Rhénanie-Palatinat), sa ville natale où vivent toujours ses parents, et un appartement à Düsseldorf, en Rhénanie. Les enquêteurs allemands ont perquisitionné jeudi 26 au soir les deux domiciles du copilote pour y trouver des « éléments personnels susceptibles d’éclairer les faits », a annoncé le parquet de Düsseldorf.
Andreas Lubitz avait commencé sa formation en 2006, dans l’école de la Lufthansa à Brême, puis à Phoenix en Arizona. Le patron de la Lufthansa a annoncé que « le copilote a interrompu, sa formation, mais qu’il a réalisé ensuite tous les tests nécessaires, il y a six ans ». Il avait alors travaillé pour la compagnie en tant que steward, selon la Lufthansa.
Selon les dirigeants de la Lufthansa, Andreas Lubitz avait passé avec succès pendant sa formation une série de tests psychologiques obligatoires. Selon le PDG, Andreas Lubitz avait « réussi tous les tests médicaux, tous les examens techniques et de contrôle, il était 100 % apte à piloter un avion. Ses capacités techniques étaient excellentes, sans exception ».Après une nouvelle formation de onze mois, il avait commencé à piloter et était devenu copilote en septembre 2013 chez Germanwings.
On peut mettre en doute l’aptitude de ce pilote
Disons-le tout net, on peut émettre les plus extrêmes réserves sur le sérieux de l’employeur de ce pilote. Selon des informations de l’Autorité allemande de supervision du transport aérien, il avait été victime d’une grave dépression durant sa formation, avait suivi un traitement psychiatrique et était toujours en traitement médical.
Le Parquet de Düsseldorf annonce que les enquêteurs ont retrouvé des attestations d’arrêt maladie déchirées chez Andreas Lubitz. Mais pour l’heure, rien annonçant un acte prémédité à l’origine de la catastrophe qui a fait 150 morts. Les attestations saisies viennent « appuyer la thèse » selon laquelle le jeune homme « a caché sa maladie à son employeur et à son environnement professionnel », selon le Parquet. Les documents retrouvés attestent d’une « maladie existante et de traitements médicaux correspondants », sans révéler la nature de cette maladie.
Il totalisait 630 heures de vol, mais seulement une centaine depuis son admission à Germanwings, ce qui est insignifiant, puisqu’un pilote fait environ 80 heures de vol par mois. Cela implique qu’il a été absent très souvent, vraisemblablement pour maladie et l’enquête apportera des éléments intéressants sur ce point délicat.
Il est probable que Lufthansa et Germanwings vont avoir fort à faire sur le plan juridique pour écarter leurs responsabilités.
Le suivi psychologique chez les pilotes de ligne
Il existe de façon approfondie à l’entrée dans le métier et dans les grandes compagnies. Mais il n’existe ultérieurement rien de systématique, dans aucune compagnie aérienne. Bien entendu, lors des contrôles en vol ou au simulateur (plusieurs par an) peuvent se manifester des cas d’espèces, mais ils sont rares puisque dans ce métier, la quasi-totalité des pilotes est plutôt du genre équilibré !
D’autre part, on se connait peu, car quand il y a 4.300 pilotes dans une compagnie aérienne, la probabilité de voler avec les mêmes est réduite sauf demande particulière. Il est donc impossible de déceler une évolution psychologique de l’un des pilotes.
Enfin, les cours annuels de CRM (Crew Ressource Management) permettent de passer en revue la perception d’éventuels conflits de personnes et d’apprendre à les éviter ou à les traiter, s’ils surviennent. La plupart du temps, la vraie personnalité d’un pilote échappe donc à l’autre et ceci vaut pour toutes les compagnies au personnel nombreux.
L’inaptitude psychologique : cela existe chez les pilotes de ligne
Lorsque j’étais Président du SNPL Air France, j’ai eu à me pencher sur le dossier des pertes de licences de vol des navigants, sur le plan statistique et sans avoir accès aux dossiers personnels, bien entendu. J’avais été surpris de constater que chez les pilotes, outre la traumatologie qui tenait une bonne place (accidents sportifs ou de circulation), la perte de licence pour raisons psychologiques n’était pas négligeable, de l’ordre de 8% chez les pilotes. Selon le médecin avec qui j’en discutais, une part notable de ces cas était une peur de voler, d’avoir à assumer la responsabilité de vies humaines.
J’ai pu mesurer cette pression sournoise, ce stress, lorsque je suis parti en retraite, tout étonné de ressentir une espèce de libération. Pourtant j’aimais mon métier et en assumais sans aucune difficulté les responsabilités inhérentes, mais je n’avais pas une conscience précise de cette pression permanente, de cette hantise de ne pas être au niveau si ce produisait l’imprévisible, ce que j’ai décrit dans mon livre de Mémoires en parlant du Désert des Tartares. Pour cette raison, je comprends que certains préfèrent lâcher prise avant le couperet de l’obligation de retraite.
Cette pression existe aussi pour les jeunes pilotes et en tant qu’ex formateur de pilotes de chasse, je sais que nous n’aurions pas accepté un profil comme celui d’Andréas Lubitz.
Je pense que ce copilote était aussi une erreur de casting pour Lufthansa !
Une enquête à terminer
Il est possible qu’on ne retrouve pas la deuxième boite noire, le FDR (Flight Data recorder), enregistrant les 1.200 paramètres du vol, car il normal qu’elle n’émette aucun signal (il faudrait qu’elle soit dans l’eau pour activer la balise) et elle peut être enfouie profondément dans le sol, dans ce site si difficile à investiguer.
A vrai dire et ce n’est pas souvent le cas, je pense qu’elle n’apporterait pas d’éléments déterminants dans l’analyse de ce crash.
Par contre, l’enquête devra se poursuivre de façon approfondie, pour comprendre pourquoi ce pilote a pu exercer un métier qu’il a déshonoré.
Pour terminer, provisoirement, j’ai une émotion sincère à la pensée de ces minutes d’horreur et de rage qu’ont dû vivre mon collègue Patrick Sondenheimer, CDB de ce vol et les passagers et membres d’équipage qui ont vu la mort arriver, victimes de cet olibrius qui n’est pas pour moi un malade , mais un criminel.
Enfin, pour ceux qui seraient tentés d’avoir peur de l’avion, n’oubliez pas que vous avez une « chance » sur 5 millions de ne pas arriver à destination et que le plus grand risque que vous courez est dans le taxi qui vous amène à l’aéroport !