Un hangar orange. On ne peut le rater quand on sort de l’aéroport de Luton, cette cité dans laquelle tant de Genevois ont transité sur le chemin de Londres. En sortant de l’aéroport, il est à droite. Il paraît vieux, comme si la peinture colorée masquait de la rouille. Il abrite une halle de maintenance d’avions. Et sert de siège à la principale compagnie britannique, easyJet.
A l’entrée, des trophées. Le groupe est régulièrement désigné «meilleur low-cost d’Europe». Derrière, une cabine téléphonique typiquement British, mais orange et non pas rouge. Elle trône devant un «open space» qui sert de bureau à une centaine d’employés (moyenne d’âge 35 ans) dont Carolyn McCall. La directrice, réputée pour l’élan qu’elle transmet à ses troupes, occupe un des ordinateurs. Nous sommes un lundi, jour de briefing. Chaque lundi, des membres de la galaxie rejoignent Luton. Ils émanent des 21 aéroports réquisitionnés pour garer les 220 appareils de la compagnie, la nuit. De jour, ils volent chacun en moyenne 13 heures.
Des employés, arrivés le matin même, repartiront dans l’après-midi. Des quasi pendulaires. Pour eux et de nombreux clients, l’Europe est un minuscule continent. «Welcome to the easyJet generation», souligne d’ailleurs une pancarte.
Le transporteur s’est lancé en novembre 1995. Le 1er avril 1999, il ouvre une base à Cointrin. Depuis, il croît. Il ne cesse de croître même. En 2013, son bénéfice net à 586 millions de francs en a fait la compagnie la plus rentable d’Europe. L’action du groupe coté au London Stock Exchange tend à grimper depuis quelques années. Avec plus d’un tiers des parts, l’actionnaire principal n’est autre que le fondateur d’easyJet, Stelios Haji-Ioannou.
Le nombre de destinations total, 700, a presque doublé depuis 2008. Avec 110 destinations depuis Genève, Bâle et Zurich sur 700 au total, la Suisse joue un rôle central pour la compagnie basée à Luton, au nord de Londres. Le nombre de destinations total, 700, a presque doublé depuis depuis 2008, quand easyJet en proposait 380.
La Suisse, avec 110 destinations depuis Genève, Bâle et Zurich, est un marché essentiel. Cointrin, avec 14 avions, figure même parmi les cinq principales bases de la compagnie. Le transporteur est le plus gros client de Genève Aéroport. Quand ils atterrissent, ses appareils ne restent guère plus de 25 minutes sur le tarmac avant de redécoller. Cette performance est facilitée par l’absence de correspondance (un avion n’attend jamais un vol en retard). Avec des escales aussi courtes, on effectue plus de vols et et on gagne en rentabilité. Dans le modèle low-cost, aime à répéter la compagnie, chaque détail compte. Des nouveaux sièges, plus légers, font économiser du kérosène, donc de l’argent. Une application mobile scannant les passeports vient d’être lancée. Elle permet aux foules d’entrer plus vite dans l’avion.
Les employés? De plus en plus nombreux, mais pas forcément satisfaits. Les conditions de travail se durcissent: «Il y a quelques années, faire deux allers retours en une journée était rare, relève un membre de cabine à Genève. C’est devenu monnaie courante; les journées de travail durent vite 12 heures, avant c’était exceptionnel.»
Cela dit à Genève, selon une récente enquête de la Tribune (lire notre édition papier du 27 septembre 2014), les membres d’équipage sont mieux payés chez easyJet que chez Swiss. Chez le transporteur bâlois, un personnel de cabine engagé à plein-temps gagne durant sa première année de fonction moins de 3600 francs en moyenne (indemnités comprises), contre près de 4000 si cette personne avait occupé la même fonction au sein de la compagnie orange.
L’importance d’easyJet (41,5% des parts de marché à Cointrin) la met en position de force quand elle négocie. Swissport, une entreprise d’assistance aérienne au sol a été obligée d’accepter un contrat aux conditions très sévères. Un contrat qu’elle ne pouvait se permettre de décliner: à Cointrin, Swissport a créé une unité spéciale de 240 employés entièrement dédiés à easyJet.
Qui sont les concurrents? Les compagnies traditionnelles dans leur marché respectif, selon ses porte-parole, alors que Ryanair, le principal low-cost du continent, ne vole que rarement sur les mêmes routes. Le géant irlandais propose des prix moins élevés (en 2013, en moyenne 48 euros le billet contre 82 euros chez easyJet), mais ses services sont réputés moins bons. Les aéroports avec lesquels Ryanair collabore sont plus éloignés des centres urbains. L’accent mis sur la ponctualité chez easyJet a séduit d’autres passagers: en 2013, 20% de sa clientèle étaient des hommes d’affaires, 9% de plus sur un an. La croissance, encore et toujours.
Source tdg.ch